Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
21 octobre 2008 2 21 /10 /octobre /2008 07:28

Traumton Records – Indigo

 Le jeune pianiste berlinois de 33 ans n'est pas très célèbre, mais il est réellement possible que ce troisième album de compositions originales lui offre un avenir prometteur. Carsten Daerr a bâti cet album sur une idée tout simplement originale : l’un des effets de la privation de sommeil est de modifier la perception sensorielle, et c’est donc lors d’un voyage autour du monde qu’il a traduit en Musique ses impressions sous l’effet du décalage horaire. « Insomniac Wonderworld » réunit un trio consensuel sur la forme en présence d’Olivier Potratz à la basse et à la contrebasse, Eric Schaefer à la batterie et à l’orgue, ainsi qu’en invité sur deux titres le saxophoniste Uwe Steinmetz. Au détour de compositions aux noms évocateurs de destinations lointaines comme « Manila », « Penang », « Kuala Lumpur », « Jakarta », « Singapur », le génie de Carsten Daerr est de savoir conserver l’impression d’étrangeté en s’abstenant habilement d’utiliser ou d’imiter les sonorités asiatiques. Il se concentre sur l’observation brute d’une culture inconnue pour tracer des perspectives musicales nouvelles avec ses partenaires. La posture artistique du pianiste est celle de l’ouverture, qui confère à cette forme de jazz une expression très singulière, faite à la fois d’énergie et d’inspiration, de recueillement et de défoulement. Cette position entonne par saccades une partition nerveuse et dynamique au piano, tandis que les embardées rythmiques du batteur sont soulignées par le jeu expressif du saxophoniste. Un équilibre parfaitement organisé pour agir sur la partie invisible qui est notre imagination. Avec des accents reggae, parfois même Dub, des incantations Hardcore, ces reflets pleins d’onirisme arrivent à nos oreilles toujours dans la plus artistique des manières, se jouant des structures, passant de sonorités années 60 à un clin d’œil au Free, le tout avec l’énergie d’un groupe de rock indépendant et dans le respect des trios jazz. C’est même avec une fantaisie et une infantilité toute particulière que la créativité du trio s’exalte sur la quasi-totalité des titres, et notamment sur la composition intitulée « Negative FX », remplie de blagues sonores en tous genres. En comparant pas si maladroitement, on y retrouve toute la malice d’un Chick Corea en très grande forme. Carsten Daerr est un pianiste remarquablement ingénieux, à suivre sur les scènes européennes et internationales. Tristan Loriaut

Partager cet article
Repost0

commentaires