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15 mai 2008 4 15 /05 /mai /2008 08:11

Act – 2008

 

Pour son quatrième enregistrement, la chanteuse norvégienne Solveig Slettahjell signe cet album entièrement sous son nom. Les membres de son Slow Motion Quintet ne sont présents qu’en tant que musiciens invités. Ce premier disque « solo » enregistré dans son living room, est avant tout un voyage introspectif où Solveig, enceinte de plusieurs mois, nous livre des chansons douces et sensibles, s’accompagnant elle-même sur son propre piano. Des chansons d’amour, belles et dépouillées, qui au fil des écoutes deviennent des petits bijoux de pop songs délicates et justes. Dès le début de l’album, nous plongeons avec ravissement dans le doux cocon feutré que nous suggère 4.30 A.M, I Do ou This Is My People. Dans le même registre, Solveig nous livre une bien belle relecture du Time de Tom Waits, qui est un de ses chanteurs-auteurs–compositeurs préférés (elle avait d’ailleurs repris Take It With Me en ouverture de son premier album Silver). Quelques fois les arrangements deviennent plus fouillés, comme sur les émouvants One of These Days, Snowfall et la superbe version du Because des Beatles. Cette surprenante reprise, avec son étirement de tempo et son ambiance de fanfare de cirque, s’avère être le sommet onirique du disque. Ces subtils et talentueux arrangements sont signés par le co-producteur et multi-instrumentiste Peter Kjellsby avec l’aide du trompettiste Sjur Mijleteig (au jeu influencé par Chet Baker). L’album se termine par Birds and Hopes, chanson pudiquement créditée en bonus track, qui envoie un message d’amour attendrissant destiné à son futur enfant. Lionel Eskenazi

 

P.S : Solveig Stellahjell sera pour la première fois en concert à Paris, le 23 juin au Sunside.

 

 

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15 mai 2008 4 15 /05 /mai /2008 08:08

CamJazz 2008




L'artiste qui surprend l'amateur de quelque discipline que ce soit peut s'assurer d'une chose : il a réalisé du bon travail. Il aura contribué à  des moments de bonheur, seraient-ils fugaces. Avec Solal, on est servis. La surprise devient carrément un concept. Chaque note de ce dernier CD est tellement imprévisible que les sourcils restent relevés en permanence. Avant l'écoute, dans les notes du livret, le célèbre critique de jazz américain Dan Morgenstern nous prévient. Il décrète Solal l'un des plus grands pianistes de l'histoire du jazz. Les dix morceaux du trio du pianiste, dont trois standards, iraient plutôt dans son sens. Son jeu époustoufle à  un point tel, il emprunte un nombre si diversifié de virages et de bifurcations, qu'il vaut mieux abandonner le projet de garder une respiration normale pendant trois quarts d'heure. Les idées fourmillent, les mélodies se multiplient, les rythmes se transmutent, puis comme un bateau qui aurait tangué jusqu'au point limite, revient après le cyclone à  leur exposition initiale. C'est vertigineux, swinguant et porteur d'émotions. Ajoutons que le choix de ses accompagnateurs encourage les raids de Solal.

La complicité surnaturelle de François et Louis Moutin (respectivement contrebasse et batterie) déteint sur le leader. Le jeu d'ensemble permet à ce dernier de décomposer encore davantage son assise rythmique, comme dans ce bijou déconcertant : Bizarre, vous avez dit ? Interlocuteurs idéaux, les jumeaux, d'une réactivité confinant à  la vitesse de l'éclair, caressent les acrobaties et portent le style du funambule au niveau du grand art. Enfin, il convient sans doute de mettre au crédit des Moutin d'avoir rendu une expression unique encore plus lisible. On le goûte avec une joie renouvelée. Morgentern a l'oreille du pro. Il a raison : aucun musicien au monde ne propose un itinéraire de cette qualité. Bruno Pfeiffer

 

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15 mai 2008 4 15 /05 /mai /2008 08:06

“Mare Nostrum” 

Act 2008.




 
« Mare Nostrum », qui veut dire en latin : « Notre Mer », explore un espace musical aux confins de la Suède, de la Sardaigne et de la France méditerranéenne. C’est le pianiste suédois Jan Lundgren qui a proposé au label Act de former un trio atypique (sans basse, ni batterie) avec l’accordéoniste niçois Richard Galliano et le trompettiste sarde Paolo Fresu. La musique, belle et ludique, nous fait d’emblée voyager dans une atmosphère tendre et nostalgique. Pas de violence, ni de nervosité et surtout pas de prise de tête ou de concept intellectuel dans cette ambiance musicale aérienne où règnent la mélodie et le chant. Un CD pour la détente, la relaxation et le rêve, qui devrait plaire à un très large public et pas exclusivement aux fans de jazz. Galliano et Fresu, aux emplois du temps chargés, n’ont composé chacun qu’un seul nouveau morceau pour ce projet (Principessa pour Galliano et Sonia’s Nightmare pour Fresu), préférant arranger d’anciennes compositions ou effectuer des reprises pour cette formule inédite. La nouvelle version du Chat Pitre de Galliano (écrit à l’origine pour un trio accordéon, violon et contrebasse sur l’album Luz Negra et pour une chorégraphie de Roland Petit) devient avec la trompette de Fresu, une émouvante musique qui évoque la nostalgie du cirque et pourrait figurer dans La Strada de Fellini. De la même manière Paolo Fresu reprend Que Reste-t-il de Nos Amours ? de Charles Trenet (qu’il avait déjà magnifié en quintet sur son album Melos) dans une version où l’association accordéon-trompette la rend encore plus poignante et sentimentale. C’est bien Jan Lundgren, qui, apportant quatre compositions inédites et un subtil arrangement sur une chanson traditionnelle suédoise, s’avère être le véritable leader de ce projet. Les très belles mélodies de Mare Nostrum (qui ouvre l’album) ou The Seagull vous trotteront longtemps dans la tête, ainsi que l’entraînant Years Ahead. Une rencontre magique de trois musiciens en parfaite osmose musicale où l’écoute de l’autre fait partie intégrante du jeu. Un disque à se procurer d’urgence et à offrir à tous vos amis.
Lionel Eskenazi

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15 mai 2008 4 15 /05 /mai /2008 08:04

Yolk Records 2008

 


Mais où est passé Francis ? On le cherche partout, vous l’avez croisé ? Rires incontrôlés lorsque l’on s’aperçoit qu’il s’agit tout simplement du pseudonyme du leader de cet atypique collectif. Inutile d’expliquer que Francis Ripolin doit son nom à un produit si cher aux peintres du bâtiment. Il est en fait question du saxophoniste François Ripoche qui s’est entouré de Gilles Coronado à la guitare électrique, Christophe Lavergne à la batterie et Fred Chiffolleau à la contrebasse. Pour un second album plus acoustique dans l’instrumentation, il faut noter aussi l’aimable participation du chanteur trublion Philippe Katerine. Cette sulfureuse équipe de joyeux lurons se devaient d’introduire farouchement ce disque par une sorte de tango, « La Paloma », libéré de toutes traditions castratrices. Plusieurs ingrédients rehaussent la sauce épicée de cette tambouille avec par exemple des rythmiques bissextiles, un timbre acidifié d’une guitare déjantée, un saxophone fou de bruitages. Par la suite, impossible de rater l’enfantine revisite des tubes interplanétaires de la variété que sont « Capri c’est fini » d’Hervé Vilard ou encore « L’idole des jeunes » de Johnny, avec l’incontournable féminité décalée de la voix de Katerine. Décidément, personne ne se prend au sérieux d’un bout à l’autre du disque, ce qui oblige l’oreille à rester attentive aux blagues qui se suivent et ne se ressemblent pas. En témoigne l’immense interaction entre les protagonistes lors du remarquable « I touch, I break, I pay ». A noter aussi l’incontrôlable déhanchement que provoque un des morceaux portant si bien le nom de « Oliver Twist ». Transporté par cette dangereuse folie musicale qui s’empare sans vergogne des styles de Musique populaire comme le Funk ou la Bossa-nova, il est inévitable d’être touché à vif par le talent énorme qui émane de chaque instrumentiste, dédiant chacun leur personnalité à l’homogénéité du groupe. Si l’analyse osait être approfondie, en dépit du résultat final, il s’agirait de remarquer l’héritage jazzistique du saxophoniste qu’il s’amuse à décortiquer, de trouver la subtile utilisation percussive de tous les bruits que peut offrir une batterie, d’être frappé par l’électrique étrangeté des effets soumis au son de la guitare. Mais comment définir l’indéfinissable avec de simples mots. Ce projet devient génialissime à travers une autre reprise, « Le douanier Rousseau », emplie une nouvelle fois de second degré par la voix bucolique de Katerine. Cette constante plaisanterie développe sa fabuleuse envergure à travers le coté brut du son, comme un peintre userait des matières premières que sont les couleurs dont il dispose. En d’autres termes, l’absence du souci de l’apparence laisse place à un humour pittoresque redoutable. Ce collectif déjanté est à découvrir avec l’urgence de la créativité que la scène demande à ceux qui la foule
. Tristan Loriaut

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15 mai 2008 4 15 /05 /mai /2008 08:02

 Cristal Records, 2008


 

Ceux-là possèdent l'art du trio au plus haut degré. Cohésion, complémentarité, complicité, imagination : faut-il encore aligner les adjectifs ? Tout est là dans un idiome musical auquel on adhère d’emblée. Avec ce nouvel opus, le troisième à notre connaissance, l’association Cholet-Kanzig-Papaux accède à la pleine maîtrise de ses  moyens. A ces qualités de mise en place, le trio ajoute un sens consommé de la mélodie : aucune reprise dans cet album, mais douze compositions originales qui mettent notamment en évidence les grandes qualités d’écriture de Jean Christophe Cholet (Beyond the Circle, Somme Song, Pablo). Ce pianiste de la race des Brad Mehldau, à la fois fougueux et précis, est épaulé ici par deux remarquables musiciens. On appréciera en particulier la frappe et les qualités de relanceur de Marcel Papaux, impressionnant de solidité tout au long d’album. Tout ou presque  fonctionne, y compris quand la machine sort un peu des voies qu’elle s’est tracée et se met en roue libre comme dans « In flagranti » ou « Rek Rap ». La ligne mélodique fait place alors à une jubilation assez communicative. Recommandé sous tous les prétextes. Loic Blondiaux

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15 mai 2008 4 15 /05 /mai /2008 08:01

 BRIan BLADE & the fellowship band– «Season of change »

Verve 2008



Brian Blade est à 38 ans l’incarnation de ce jazz actuel qui va de David Binney à Mark Turner ou Chris Potter. Batteur prodige, on l’entend notamment aux côtés de Wayne Shorter, de Joshua Redman et d’une manière générale de tout ce qui compte Outre-Atlantique. Avec Clarence Penn, Nasheet Waits ou Jeff Tain Watts il représente véritablement une quatrième voie de l’instrument. Celle qu’il explore tout au long de cet album porte la marque des ses propres influences musicales qui se situent exactement entre un jazz post Shorterien et une pop minimaliste. Influence que l’on retrouve d’ailleurs chez ses camarades de jeu à tel point que l’ouverture de cet album semble nous replonger dans le dernier opus de Dave Binney tant les esthétiques sont proches. Mais l’album remarquablement (trop ?) produit et artistiquement co-dirigé de main de maître par Hollis King (Directeur artistique de Verve) mais surtout par Blade lui-même suit une progression ultra scénographiée qui l’emmène ailleurs. Une véritable dramaturgie s’installe qui se perçoit à l’écoute de l’album dans sa globalité. Des solistes exceptionnels, qu’il s’agisse du saxophoniste alto Myron Walden (très impressionnant) ou de Rosenwinkell qui affiche ici un jeu plus Methenien qu’à l’accoutumée, participent à ces crescendi portés à leur paroxysme. Une fois n’est pas coutume ce sont eux qui révèlent l’intensité incandescente du jeu de Brian Blade maître dans l’art de la mise en tension. La construction d’un morceau comme Return of the Prodigal Son  avec ses trois étapes (le départ libérateur puis le tumulte et enfin le retour) est admirablement et intelligemment posée. Cette musique prend alors au fur et à mesure de l’album une dimension presque mystique dans son incandescence voire carrément religieuse (Improvisation ou Alpha et Omega). C’est un peu comme si, ce fils de pasteur redécouvrait alors une autre mystique Coltranienne, bien loin dans la forme mais si proche dans l’inspiration. Dans l’élévation autant que dans le tumulte.
Jean-Marc Gelin

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15 mai 2008 4 15 /05 /mai /2008 07:59

Obliq Sound 2008


 

 

Il ne faut pas attendre la troisième note de musique pour se rendre compte de la qualité d’un tel projet. C’est le contrebassiste d’origine italo-suédoise Massimo Biolcati qui mène la barque. A priori, sur le papier, le défi à l’air d’être extrêmement relevé par la présence d’incontournables magiciens contemporains, en la personne de Lionel Loueke à la guitare, Jeff Ballard à la batterie et de Peter Rende au piano. Lizz Wright et Gretchen Parlato occupant la partie vocale sur deux morceaux différents, « Winterhouse » et « Clouds ». Ce merveilleux premier opus de dix compositions originales du leader est consacré en deux parties distinctes. Tout d’abord « Motion », incluant les pièces énergiques du répertoire, puis ensuite « Stillness », regroupant des balades intimes aux reflets nocturnes. Tout au long du disque est mise en évidence une énergie homogène. Un remarquable terrain de jeu pour chaque soliste offrant un pur régal à l’écoute de chaque mesure. Ce disque s’ouvre d’ailleurs par une composition au thème aussi déroutant que le premier chorus du guitariste d’origine béninoise qui, doit-on le rappeler, est un habituel sideman des projets d’Herbie Hancock. Ce thème s’articule de façon originale avec deux lignes mélodiques entrecroisées. L’une doublée par la contrebasse et la main gauche du pianiste, en opposition avec l’autre, interprétée par la main droite du pianiste doublée d’une guitare aux reflets électroniques, causés par un effet électronique. L’étrangeté de cet arrangement attise l’oreille pour la suite du voyage. Ici domine un esprit Jazz-Rock remémorant les belles heures du collectif Steps Ahead. Le synthétique laissant sa place à un coté plus africain apporté par le timbre boisé de la guitare, agrémenté aussi par le chant de l’instrumentiste doublant chacune de ses notes tel un Georges Benson inspiré. La poésie transpire dans tous les recoins du répertoire, transmettant une généreuse efficacité d’improvisation. Dans un des titres d’environ huit minutes, intitulé « Transference », se conte une fable en plusieurs parties, à chaque fois différentes dans leurs complexes constructions rythmiques. Avec cette approche simple et fantaisiste des sonorités africaines faite essentiellement de polyrythmies se remarque une touchante sensibilité, toujours au service d’une interaction musicale hors norme. Idéale transition à la deuxième approche du disque, « Stillness », beaucoup plus développée en sensualité par la présence de la voix de Lizz Wright. Le groupe se transforme alors en cocon, adoptant une remarquable attitude d’accompagnement tout en souplesse et sophistication sonore. Il est possible aussi d’observer le caractère percussif du choix de peaux du batteur Jeff Ballard qui est connu pour être relativement polyvalent dans tous les projets auquel il participe. Ce merveilleux opus se referme sur une complainte interprétée à l’accordéon par le claviériste Peter Rende, qui use lui aussi de sa voix pour orner celle de son instrument. Ainsi se termine le majestueux voyage au gré des vertueux accents de bonté, de lyrisme, accessibles à toutes oreilles qui se laisse embarquer sur les vagues magiques du rêve… Tristan Loriaut

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14 mai 2008 3 14 /05 /mai /2008 22:50

 Candid2008


 

Les bienheureux, vous là qui habitez sur la Côte d’Azur, vous auriez peut être pu nous prévenir qu’il y avait quelque part nichée du côté de Nice, une jeune pianiste totalement et injustement méconnue sous nos nordistes latitudes ! Et il faut bien rendre hommage à Sir Ali de venir aujourd’hui la propulser sur le label Candid tant on est heureux de découvrir cette jeune pianiste.

On passera rapidement sur une promo qui se hasarde à vouloir absolument créer un lien entre la musique de Ryoko et la musique française du début du XX° siècle, pour ne retenir que l’essentiel. Cette jeune pianiste japonaise qui vit en France frémit de grâce et d’énergie. Apporte une grande bouffée d’air frais et carrément printanier dans un exercice qui prend trop souvent des airs contrits d’introspection douloureuse. Rien de cela ici. Car Ryoko virevolte avec autant de grâce que de légèreté dans les haut de son piano. Aussi délicate que franche dans ses attaques du clavier. Rebelle à tous les formats préétablis du trio, la jeune pianiste se révèle d’une très grande inventivité dans le parcours de ses propres thèmes (elle y signe 8 compositions sur 11) marqués parfois par de véritables et astucieux revirements. S’appuyant aussi sur des mélodies simples (qui peuvent évoquer Ravel – à la limite) elle semble faire danser son piano avec l’insouciance d’une personnalité forte et libre (Bonsaï bop). Et ses clins d’œil à son Japon natal qui peuvent revêtir un brin de nostalgie ne s’y font jamais caricaturaux ni lourds de mélancolie. C’est au contraire avec une très grande sensibilité que Ryoko passe d’un jeu dense où virevoltent de mutines arpèges à l’inspiration de thèmes où la musique s’aère et se donne le temps de respirer (Ryoko@ravel ou ce très beau et très zen Sketches of Japan). L’insaisissable pianiste a déjà tout appris. A l’heure où beaucoup de jeunes trios hésitent entre la face Meldhau ou la voie Svensson, Ryoko affiche a contraire une vraie personnalité. Déjà son jeu raconte une expérience vécue entre la France et la Japon. Elle nous en livre ici quelques clefs bien captivantes. Avec la vraie fraîcheur d’un jeu totalement décomplexé                                             Jean-Marc Gelin

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5 mai 2008 1 05 /05 /mai /2008 23:32



Éclipse, un film de Jacques Goldstein

Fredon No Collection

LA HUIT - 2008

 

Poursuivant son chemin en direction de l’ancienne avant-garde New Yorkaise et des jazzmen qui continuent de faire les beaux jours du post-free jazz tel que l’on peut l’entendre au Vision Festival ou à la Knighting Factory, la Huit présente ici, après le travail remarquable de Anaïs Prosaïc sur Marc Ribot, un film de Jacques Goldstein sur le trompettiste New Yorkais Wadada Leo Smith filmé le 31 mars 2005 à l’occasion du festival Banlieues Bleues.

Il s’agit essentiellement d’un concert ( au demeurant magnifique) donné avec son groupe, le Golden Quartet composé de Vijay Iyer aux claviers électroniques, de John Lindberg à a basse et de Ronald Shannon Jackson à la batterie. Un concert filmé en noir et blanc, caméra sur l’épaule (un peu trop agitée à notre goût et évitant hélas les plans fixes trop longs) et qui ravira les partisans de cette prolongation par d’autres moyens du free jazz d’Ornette Coleman.

Une performance magnifique comme le est toute la prestation de ce trompettiste d’exception qui à 66 ans cultive le goût du quartet d’Ornette sans jamais pourtant singer le jeu de Don Cherry. Son goût de l’improvisation et du cheminement solitaire évoque parfois le travail de Antony Braxton, la dimension expérimentale en moins. Mais toujours chez Smith ce goût de la musique envoûtante, du mystère presque pictural et si proche d’autres formes artistiques que l’on y associerait volontiers les

Films de Cassavetes ou la peinture de Jackson Pollock.

 

Entre chaque morceau de ce concert, Jacques Goldstein recueille quelques courtes reflexions du musicien sur quelques points essentiels de sa musique que, dans le sillage de Ornette il qualifie de « creative music » au détriment de jazz qu’il ne retient pas comme définissant son propre travail. Puis suit une interview plus longue où Wadada Leo Smith poursuit sa réflexion autour de quelques questions captées vraisemblablement lors de sa venue en France à l’occasion de ce concert.

 

On ne saurait donc que rendre hommage à ce travail qui permettra à beaucoup de découvrir cet artiste absolument incomparable même si, comparativement au vrai travail de fond qui avait été fait sur Marc Ribot, on reste là beaucoup plus réservés, moins sur la qualité de ce concert passionantissime que sur la réalisation dont on ne comprend pas toujours les partis pris esthétisants : pourquoi le noir et blanc ? Pourquoi des images imposées à notre imaginaire comme celles un peu ridicules – excusez le cliché – d’une voiture roulant dans le nuit au milieu des néons de la ville ? ). Mais surtout ce travail se révèle particulièrement pauvre quand à sa documentation totalement inexistante sur le musicien que tout un chacun est censé connaître. Il est peu admissible en effet que la Huit ne se donne pas le temps de rédiger au minimum quelques liner notes à défaut d’un véritable livret pour présenter en quelques mots au moins la biographie de ce trompettiste essentiel qu’est Wadada Leo Smith.

 

Cependant, pas de quoi bouder notre plaisir et il faut rendre au moins justice au courage de la ligne éditoriale de la Huit qui n’hésite pas à s’investir dans cette musique exigeante au mépris des considérations commerciales qui animent aujourd’hui un grand nombre d’éditeurs de DVD. C’est assez rare pour être souligné et précieux pour être encouragé. Peut quand même mieux faire dans l’approche didactique.  Jean-Marc Gelin

 

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5 mai 2008 1 05 /05 /mai /2008 23:28


Dom Disques 2008


 
« Praxis », terme issu de la langue grecque signifiant « action », désignant l'ensemble des activités humaines susceptibles de transformer le milieu naturel ou de modifier les rapports sociaux. C’est sous ce nom que Laurent Stoutzer intitule son troisième album, tout comme le quartet qu’il constitue, il y a maintenant une poignée d’années. Après le remarqué « El Ojo De Tempestad » en 2003 aux cotés d’un certain pianiste Yaron Herman, incroyable prodige israélien, il revient accompagné par un autre grand talent des touches noires et blanches, le non moins célèbre Benjamin Moussay. À noter aussi, la présence à la contrebasse d’Arnaud Cuisinier et à la batterie de Luc Isenmann. Ce disque commence par un thème modal aux résonnances diverses (« Phantomatic »), au fil des solos du guitariste et du pianiste. Dans cette comptine se décline une sensibilité commune au sein d’un quartet dédié aux étirements harmoniques. C’est dans le second morceau, « Ishima Iwa », que la fusion explosive prend sa place, avec pour objet principal une incroyable envolée accomplie par l’archet de la contrebasse, doublée d’un effet de distorsion. Il en va sans dire qu’un certain esprit Pop-music se dégage d’une telle instrumentation. C’est ensuite par un troisième morceau, « Mayana », que la mélancolie fait son apparition, dans toute sa splendeur, Blues compris. On peut d’ailleurs subtilement y remarquer certains stop-chorus en duo batterie-soliste, offrant un régal rythmique. Remarquable dans chacune de ses exécutions, Benjamin Moussay égraine les mesures tel un habile mélodiste, éblouissant par son talent chaque prise de risque. Il n’en est pas moins des autres instrumentistes lorsqu’on écoute le reste du disque, d’une oreille nostalgique des célèbres opus du guitariste John Abercrombie chez ECM. Une ambiance proprement feutrée, un style épuré de la composition, un talent et un travail énorme de la spontanéité. Au cours de la cinquième composition, « Stygmates », se révèle enfin un récitatif coltranien diaboliquement conçu dans un désordre contrôlé. De romanesques effluves nappés de digressions sonores nous invitent à méditer sur la révolte qui sommeille en chacun de nous-mêmes. Un pur moment de folie, toujours dans un souci permanent de l’idéal. On y ressent d’ailleurs cette éternelle frustration que le clavier ressasse à travers sa caractéristique tempérée que cet instrument est obligé de proposer. Comme pour se rattraper, c’est un cri qui nous vient de ce même clavier, aux limites de l’inaudible, magistralement construit au fil de la montée du volume, tel un réveil de volcan. Désormais chamboulé par ce voyage de neuf minutes au pays du délire intense, il faut retrouver ensuite le coté serein et poétique de la Musique de ce quartet. La générosité de ces protagonistes est sans fin, sans failles. La question se pose lorsqu’il faut imaginer combien de jours de studio il a fallu pour réaliser un tel travail de prise de son, de mixage et de mastering. Malheureusement, impossible de connaître la date d’enregistrement ainsi que le nom des compositeurs, la pochette du disque ne stipule aucunes indications dans cette voie. Un oubli grossier dont on ne tiendra pas rigueur aux acteurs de ce road-movie sonore aux couleurs aussi étranges qu’épurées. Un dernier morceau referme l’album sous le nom de « Duo », cassant une nouvelle fois les esthétiques en proposant une autre approche sonore, en hommage aux riffs fracassants des guitaristes de Pop-Rock. Un album aux facettes aussi multiples que somptueuses. À quand les concerts ? Tristan Loriaut

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