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22 mai 2023 1 22 /05 /mai /2023 10:17

Nicolas Stephan (saxophones ténor & alto droit, synthétiseur, trompette, clarinette alto, compositions, textes)

invité : Sébastien Brun (batterie & électronique)

Maxi 45 tours Petit Label / Modulor ; et sur les plateformes numériques

https://nicostephan.bigcartel.com/product/null-nicolas-stephan-solo

 

En vinyle, cet opus solitaire du musicien-auteur. Solitaire pour deux plages, et accompagné par l’invité sur la troisième. Deux plages au singulier sur trois. Mais ce singulier est aussi porteur d’absolue singularité, de ce qui n’appartient qu’à lui.

C’est d’abord une sorte de chant, libre et mélancolique, presque une plainte qui va se muer en virulence. Le texte en façade du disque, comme un poème mystérieux, commence ainsi

 

Zéro n’existe

Un cercle croule

Une boucle, un piège

Une cible, Null….

 

Puis une polyphonie s’installe, par la magie des machines. Une profusion qui ouvrira la voie à d’autres chants intimes.

 

Suivra un cheminement dans la multi-phonie, une incantation peut-être. Un chemin de mystère qui reviendrait sur ses traces pour les subvertir.

 

Vient enfin le duo, plus qu’un duo car saxophone et batterie affrontent un vinyle non-identifié. Autre mystère, mais dans cette densité qui conjugue concertation et hasard, le saxophone poursuit son chant. Mystérieux certes, mais fascinant.

 

Xavier Prévost

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Concerts solo à venir, le 25 mai à Rouen (La Brique), le 28 mai à Bagnolet théâtre de l’Échangeur,et le 30 juin à Paris (Galerie Les 26 chaises)

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21 mai 2023 7 21 /05 /mai /2023 21:09

Hervé Sellin (piano), Jean-Paul Celea (contrebasse), Daniel Humair (batterie). Studio Sextan, Malakoff, septembre 2021. Frémeaux & Associés/Socadisc. Sortie mars 2023.

Est-ce un clin d’œil de l’histoire ? Le concert de sortie de New Stories s’est tenu le 22 mars, le lendemain de l’avènement du printemps et aussi pour les « soixante-huitards » associé au 22 mars 68, date de naissance du Mouvement ayant conduit à l’effervescent mai 68. Soyons clair : cette soirée au Bal Blomet (75015) restera comme la Première remarquée d’un trio aussi jeune (dans l’esprit) qu’expérimenté (dans la pratique) : Hervé Sellin, pianiste et initiateur du projet, Jean-Paul Celea, contrebasse, Daniel Humair, batterie.

L’art du trio, les trois comparses en connaissent les ressorts et les subtilités. La liste serait trop longue de leurs contributions depuis les années 60 à ce format le plus usité du jazz. Loin d’en avoir épuisé les charmes, Hervé Sellin, Jean-Paul Celea et Daniel Humair se livrent ici à une fête qui consacre le partage des valeurs suprêmes du jazz, la combinaison de l’écriture et de l’improvisation. Ces trois là ne cèdent pas à la tentation de l’excès de confiance et s’épanouissent dans une écoute et un respect réciproques.

Les douze titres, dont neuf compositions d’Hervé Sellin (y compris deux signées par les 3 interprètes), sont autant de miniatures, des pièces courtes (au maximum 5 minutes et 6 secondes) dévoilant l’essentiel et laissant deviner le reste. Une alternance de plages de sérénité –en ouverture et clôture de l’album- et de moments enjoués propres à la virtuosité (jamais gratuite) et à ce que l’on dénomme, référence classique, le swing. L’amateur éclairé y retrouvera par instants des accents de Martial Solal (le goût de la surprise) sous les doigts du pianiste, la plénitude du son de la contrebasse de Jean-Paul Celea (avec ou sans archet), la précision du coloriste batteur-peintre (ou peintre-batteur) Daniel Humair.

Un album enthousiasmant qui s’annonce déjà comme un des disques de l’année et qui prend tout son sel dans son expression sur scène. Avis aux programmateurs de festivals !

Jean-Louis Lemarchand

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21 mai 2023 7 21 /05 /mai /2023 17:59

42 ème Edition de Jazz Sous les Pommiers

Du 13 au 20 mai 2023

 

Mardi 16 mai 

 

Le mardi de 15h à 18h, au Magic Mirrors de Coutances, nous avons pu assister à la première partie de la scène Jazz Export Days organisé par le CNM (Centre National de la Musique). Une sélection de quatre formations représentatives du jeune jazz français étaient venus jouer des showcases de 30 mn chacun afin de convaincre des programmateurs étrangers venus à Coutances pour l’occasion.

 

C’est le délirant et singulier trio féminin Nout qui ouvrait le bal. Une formation instrumentale originale : flûte, harpe et batterie, joués respectivement par Delphine Joussein, Rafaëlle Rinaudo et Blanche Lafuente. Une musique inclassable autour d’un jazz déjanté, énergique et drôle qui flirte avec le punk-rock, la rébellion et le surréalisme. Les trois dames sont impressionnantes et poussent leurs instruments dans leurs derniers retranchements afin de nous proposer un spectacle unique et innovant.

Le quintette Tigre d’Eau Douce du saxophoniste Laurent Bardainne (avec Arnaud Roulin, Sylvain Daniel, Philippe Gleizes et Fabe Beaurel Bambi) a enchaîné et il a séduit le public avec ses courts morceaux construits comme des chansons instrumentales, faciles à retenir, diablement énergiques et s’apparentant à de hits potentiels. Nous sommes loin du jazz, du ternaire et de l’improvisation, mais c’est terriblement efficace, ludique et joyeux et ça nous donne une envie irrésistible de danser !

Le jazz avec un grand J, était pourtant bien présent dans ces Jazz Export Days avec le fantastique trio du contrebassiste Théo Girard comprenant le trompettiste Antoine Berjeault et le batteur Antonin Leymarie. Une formation sans instrument harmonique qui propose une musique excitante et exigeante, où les superbes compositions de Théo Girard (comme son fameux tube Champagne) prennent un nouveau relief autour d’une interaction exemplaire. La trompette du talentueux Antoine Berjeault s’octroie un très bel espace et une place de choix au sein de cette formation à la musique particulièrement jouissive. 

C’est le quintette Ishkero (Adrien Duterte, Victor Gasq, Arnaud Forestier, Antoine Vidal et Tao Ehrlich) qui a clos cette première journée des Jazz Export Days. Un jazz électrique et funky emmené par cinq jeunes garçons dans le vent qui ont démarré le groupe à leur adolescence puisqu’il paraît qu’ils jouent ensemble depuis 15 ans ! Ça groove à souhait, c’est ludique et ça joue très bien !

A 20h30 au Théâtre, on a pu apprécier la nouvelle (et dernière) création du tromboniste-résident Fidel Fourneyron qui termine ses trois années à Coutances, entouré d’un Brass-Band singulier qui renouvelle le genre. Les compositions de Fidel proposent à chaque fois un très beau dialogue musical entre son trombone et la trompette lyrique de Quentin Ghomari, autour d’une section rythmique puissante emmenée par le tuba de Fanny Meteier, la batterie aux accents réunionnais d’Héloïse Divilly et les claviers électriques et vintage (années 80) de Fabrizio Rat.

L’envie d’assister à la soirée blues me démangeait et à la fin du concert de Fidel Fourneyron, je filais Salle Marcel Hélie pour voir le très beau concert du bluesman Robert Cray qui va bientôt fêter ses 70 ans et à qui l’on donne facilement 20 ans de moins ! Un blues chaleureux et funky renforcé par l’orgue Hammond de Dover Weinberg, la belle voix de Robert et son jeu de guitare fulgurant, interprété essentiellement sur Fender Stratocaster. Si l’on réduit souvent le blues à trois malheureux accords, nous sommes impressionnés par la richesse harmonique du jeu de guitare rythmique de Cray qui explose avec talent ce quota de trois accords ! Du grand art !

Mercredi 17 mai

@Lionel Eskenazi

Deuxième et dernier jour des Jazz Export Days au Magic Mirrors avec tout d’abord l’impressionnant Red Desert Orchestra de la pianiste et cheffe d’orchestre Eve Risser. Un jazz extatique et prégnant aux couleurs africaines, qui nous transmet une folle transe communicative sur des rythmes fous emmenés par des balafons et des djembés, avec une belle brochette de soufflants dont on distingue le saxophoniste Antonin Tri-Hoang, le trompettiste Nils Ostendorf et le tromboniste Mathias Müller.

Après le Red Desert Orchestra, la couleur rouge va continuer à imprégner la scène du Magic Mirrors avec le trio de la pianiste Madeleine Cazenave, justement intitulé « Rouge » ! Un trio qui a encore un peu de mal à trouver sa propre identité, entre des réminiscences de musique classique proche de l’univers de Ravel et des tentations vers des sonorités et des rythmes que n’auraient pas reniés le trio E.S.T. Toujours est-il que cette musique n’est pas dépourvue de talent et d’intérêt avec une mention spéciale au contrebassiste Sylvain Didou, très impressionnant.

Puis ce fût le tour de la chanteuse Camille Bertault d’investir la scène du Magic Mirrors, accompagné entre autres par les talentueux Julien Alour et Minino Garay. Elle nous a interprété des titres de son dernier album « Bonjour Mon Amour » dont elle a écrit l’intégralité des paroles (exclusivement en français) et des musiques. Son charme, sa présence scénique et son brillant sens de l’improvisation nous font facilement oublier quelques petits problèmes de justesse. Nous avons tout de même été surpris que Camille Bertault ne joue pas le jeu du format de 30 mn imposé par ces show cases et chante près de 45 mn alors que tout le monde a respecté cette règle.

Enfin, le dernier des huit groupes de ces Jazz Export Days fût celui du batteur et compositeur guadeloupéen Arnaud Dolmen, magnifiquement entouré de son inséparable complice le pianiste brésilien Leonardo Montana, du saxophoniste Francesco Geminiani et du contrebassiste Samuel F’hima. Un quartette magique qui mêle jazz et musique guadeloupéenne avec beaucoup de sensibilité et de feeling et qui suscite beaucoup d’intérêts, au point qu’on lui souhaite beaucoup de succès !

A 18 h au Théâtre, les Antilles nous tendaient à nouveau les bras avec la musique raffinée, élégante et subtile de la contrebassiste et compositrice Sélène Saint-Aimé. Des compositions lumineuses, spirituelles et poétiques portés par un fabuleux groupe avec deux soufflants exceptionnels : Hermon Mehari et Irving Acao. Et puis une brillante et singulière idée qui consiste à mêler le tambour bélé de Martinique (joué par Boris Reine-Adélaïde) ave le tambour Kâ de Guadeloupe (Sonny Troupé).

Toujours au Théâtre, à 22h, ce fût le concert-évènement que tout le monde attendait et qui restera comme un des pics culminants de cette 42 ème édition de Jazz Sous les Pommiers.

@Lionel Eskenazi

Il s’agit bien sûr du duo composé du saxophoniste français Pierrick Pédron et du pianiste cubain Gonzalo Rubalcaba. Un évènement bien sûr, car après avoir enregistré leur album il y a près d’un an à New-York, ils n’avaient pas encore eu l’occasion de rejouer ensemble et cette prestation au Théâtre de Coutances demeurera à jamais leur tout premier concert ensemble ! Ils ont interprété avec brio les titres de leur album avec beaucoup de classe et une belle concentration. L’interaction entre ses deux musiciens de premier plan était à son maximum, ils se comprennent au quart de tour et rebondissent chacun aux propositions de l’autre avec une facilité déconcertante. Un moment magique et inoubliable porté par une musique d’un niveau exceptionnel.

Lionel Eskenazi.

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19 mai 2023 5 19 /05 /mai /2023 21:53

Fanny Ménégoz (flûtes traversières, composition), Gaspar José (vibraphone, percussions), Alexandre Perrot (contrebasse), Ianik Tallet (batterie)

Villetaneuse, 23-24 mai 2022

Onze Heures Onze ONZ 050 / Socadisc

 

Deuxième disque de la flûtiste, et affirmation conjointe de la quête d’un jazz contemporain et d’une revendication de l’effervescence propre au jazz. Les thèmes s’affranchissent de l’univers tonal, les improvisations sont ouvertes, souvent dans un horizon modal. C’est très vif, sinueux, ça vous embarque : la flûte est d’une liberté insolente, tout en gardant l’élan thématique et ses intervalles distendus. Chaque titre nous emmène vers un univers autonome, et pourtant la constante est là, d’une esthétique aventureuse autant que maîtrisée. À la fin de chaque plage on se dit ‘où vont ils-elle nous entraîner’ ? Et chaque fois surgit un horizon neuf, une aventure musicale, un nouveau battement. Les partenaires de la flûtiste font preuve, dans leurs improvisations, de ce même goût d’une liberté qui entrevoit toujours son horizon. Libre et construit. Construit et libre. Comme le jazz. Une réussite.

Xavier Prévost

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Le groupe est en concert le 24 mai 2023 à Paris, à La Petite Halle, en co-plateau avec le groupe Phonem de Maïlys Maronne

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Un avant-ouïr sur Youtube

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18 mai 2023 4 18 /05 /mai /2023 11:23

Adrien Moignard (guitare), Diego Imbert (contrebasse)

Saint Laurent du Mottay (Maine-et-Loire) 14-16 juin 2022

Label Ouest / Hachette distribution

 

Cela fait des années que j’écoute Adrien Moignard avec grand plaisir, et admiration. C’est l’Ami Franck Bergerot qui avait attiré vers lui mon attention. Le 23 janvier 2010, jour du centenaire de la naissance de Django Reinhardt, je l’avais invité à donner en trio un concert ‘Jazz sur le Vif’ au studio 105 de la Maison de Radio France. La veille, il jouait à Copenhague avec le big band de la Radio Danoise : les Scandinaves ont toujours accordé une attention particulière au prolongement du jazz manouche en Europe. Lors de ce concert, il n’y eut pas que des compositions de Django, ni même que des thèmes de son répertoire : par exemple le trio joua So What de Miles Davis. Ce que j’aime chez ce guitariste, c’est la liberté avec laquelle il prolonge cet héritage, liberté harmonique, autonomie du phrasé…. Le retrouver, 70 ans après la mort de Django, dans ce disque sur les compositions du guitariste (et aussi un thème co-signé par Stéphane Grapelli), c’est redécouvrir son art de dire sa singularité dans l’approche de cet univers. La complicité du contrebassiste Diego Imbert, orfèvre ès-duo, y contribue largement. La sonorité de la guitare chante comme on respire, et les phrases de l’improvisation, côté guitare comme à la contrebasse, s’engagent dans des méandres qui nous transportent au-delà de l’univers de référence. On est tout à la fois chez Django et ailleurs, du côté de ce que le jazz a produit depuis 1953, et que le Prince du jazz manouche entrevoyait dans sa période ‘électrique’, vers 1947. Le choix d’Adrien Moignard est de jouer un instrument acoustique - choix constant chez lui – avec ici des cordes nylon, confirme cette singularité. Et de plage en plage la réussite est constante : les thèmes de Django sont comme revivifiés, sans le syndrome naphtaliné qui affecte parfois de telles entreprises. Belle réussite, et considérable plaisir d’écoute.

Xavier Prévost

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Un avant-ouïr sur Youtube

 

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16 mai 2023 2 16 /05 /mai /2023 19:34

Laurent Cugny (piano électrique, arrangements, direction), Pierre de Bethmann (piano électrique), Laurent Coulondre (orgue), Manu Codjia (guitare), Jérôme Regard (contrebasse), Stéphane Huchard (batterie), Antoine Paganotti (batterie), Quentin Ghomari (trompette), Martin Guerpin (saxophone soprano), Stéphane Guillaume (clarinette basse), Clément Daldosso (contrebasse), Élie Martin-Charrière (batterie)

Villetaneuse, septembre 2022

Frémeaux et Associés FA 8601 / Socadisc

 

Le retour au disque de Laurent Cugny, avec un nouveau groupe, qui rassemble des partenaires de haut vol, entre ceux qui ont accompagné sa carrière, et la nouvelle génération. Deux batteries (l’historique Stéphane Huchard en permanence, et en alternance Antoine Paganotti & Élie Martin-Charrière), deux pianos Fender et un orgue Hammond B3, une seule contrebasse à la fois, et des solistes inspirés : Manu Codjia, Martin Guerpin, Stéphane Guillaume : une affiche de rêve au service d’une idée musicale, celle de Laurent Cugny, manifestement partagée par tous les membres du groupe. C’est comme la rencontre des tropismes du pianiste-arrangeur-leader (Miles Davis période électrique, Joe Zawinul….) et de sa culture, de Duke Ellington aux Beatles en passant par Joni Mitchell et Pat Martino. Avec en filigrane l’ombre tutélaire et bienveillante de Gil Evans, auquel il a consacré un livre décisif, et qu’il avait aussi accueilli dans son orchestre à la fin des années 80 pour une tournée européenne et deux disques. Deux compositions originales qui reflètent exactement les aspirations esthétiques de Laurent Cugny (foisonnement dans la lisibilité, liberté des solistes qui sont totalement en phase avec l’esprit de la musique). Et cet esprit va prévaloir, de plage en plage, dans la reprise de thèmes extrêmement divers : l’incroyable arrangement de  I Want You (Lennon-McCartney) va restituer, via le traitement des instruments à vent notamment, une vocalité expressive qui fait renaître l’impact de l’original. Ou encore L’air que l’on respire, de Michel Jonasz, que je ne connaissais pas, et dont je découvre les ressources dévoilées par le magicien Cugny et ses comparses. L’esprit du jazz, en somme, qui consiste à se réapproprier toutes les musiques pour en faire son miel. Le Mood Indigo d’Ellington se trouve paré d’habits neufs, sans être aucunement trahi ; etc…. etc…. La magie des alliages et des textures (3 claviers, 2 batterie) combinée à la force des solistes (que l’on devine tout à la fois dirigés et libres) fonctionne en permanence. Toutes les plages sont fortes, et ce disque est une absolue réussite, de sa première à sa dernière minute.

Xavier Prévost

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Le groupe sera en concert le 17 mai à Paris, à l’auditorium du site Jussieu de la Sorbonne (festival Jazz à Saint-Germain-des-Prés), le 9 juillet au Saint Omer Jaaz Festival (Pas-de-Calais) & le 4 août au festival de La Londe (Var)

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Quelques avant-ouïr sur Youtube

https://youtu.be/Nh3ELA7vrnQ

https://youtu.be/leLhUVem-sI

https://youtu.be/ureQXIq4Co4

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15 mai 2023 1 15 /05 /mai /2023 10:11

BEN WENDEL : «  All alone »

Edition records 2023


Ben Wendel (ts, ss, bassoon, EFX, percus) + Cecile Mc Lorin Salvant (vc) +José James (vc) + Terence Blanchard (tp) + Steve et Beth Wood (percus) + Bill Frisell (g) + Elena Pinderhugues (fl)

 

Il s'agit ici de bien plus que d'un simple album du saxophoniste américain Ben Wendel. Il s'agit d'une œuvre. Voire d'un chef-d'oeuvre.
Avec son incroyable dimension compositionnelle et orchestrale.

Car pour cet album de confinement, le saxophoniste a imaginé, seul (All alone) avec des saxophones, son basson et ses logiciels, une masse orchestrale lui permettant de juxtaposer jusqu’à 30 pistes de saxophones lui servant de véritable orchestre à lui tout seul sur lequel il a pu inviter, pour chacun des morceaux un véritable all-stars d’invités.

Avec son côté self-made, il en est ressorti avec une oeuvre luxuriante et riche.Et même un peu glaçante par son côté orchestre sans orchestre.

 Mais il n’empêche. Tel un plasticien, Ben Wendel livre au final une œuvre assez monumentale.
L'ensemble est, on le répète écrit pour offrir une sorte d'écrin pour chacun des solistes comme sur ce Speak joy aux airs de conte fantastique sur lequel s'élève l'incroyable la flûtiste californienne Elena Pinderhugues que l'on a l'habitude d'entendre aux côtés de Christian Scott et que l'on entend ici dans un dialogue contrapuntique avec Ben Wendel.

Sur Throughout c'est une toute autre couleur qu'exprime la guitare de Bill Frisell et ses reverbs bleutées qui déploient pour l' « orchestre-Wendel » des tapis harmoniques sur lequel, dans un chassé-croisé s'entrelacent Bill Brisell et le saxophone de l’hôte. Et que dire de In anima avec Tigran Hamasyan aux allures de cantique crépusculaire ! Un des moments fort et puissant (choc au plexus) de l'album qui accède presque à l'art plastique.

A côté de ses compositions, deux standards chanté ou magnifié pourrait-on dire l'un par Cecil Mc Lorin Salvant (I love you Porgy) et l'autre par Jose James (Tenderly). Pourquoi ? Parce qu'il s'agissait d'un acte d'amour pour ses deux chanteurs qu'il voulait avoir sur l'album sans forcément qu'il y ait un lien avec le reste. Juste pour la beauté du geste.

 

On se laisse prendre par cet album majeur comme devant une installation artistique. Comme une sorte d’architecture éphémère qui n’existera vraisemlamement que sur son support.

Avec Ben Wendel, le jazz accède à une autre dimension de l’art.

Et c'est magique !

Jean-Marc Gelin

Écoutez Ben Wendel sur Open Jazz
"Ben Wendel, la cour des grands" sur https://www.radiofrance.fr/francemusique/podcasts/open-jazz/ben-wendel-la-cour-des-grands-5091815 via @radiofrance

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7 mai 2023 7 07 /05 /mai /2023 17:47
NICOLAS FILY     Don Cherry Le Petit Prince Du Free

NICOLAS FILY      Don Cherry Le Petit Prince Du Free

 

Editions Le Mot Et Le Reste

Musiques (lemotetlereste.com)

 

The mystery song - Don Cherry (Featuring Ornette Coleman & Steve Lacy) - YouTube

 

 

Nicolas Fily dont on avait aimé The Wise One, formidable portrait de John Coltrane, continue avec Don Cherry, autre musicien de jazz, toujours souffleur, qu’il découvrit en préparant ce premier livre, déjà publié aux indispensables éditions marseillaises du Mot et du Reste. Les deux musiciens avaient enregistchez Atlantic The Avant Garde partageant un rapport spirituel, voire mystique à la vie, dans le désir commun d’explorer de nouvelles voies dans un art total.

Le poétique sous-titre de l’ouvrage est dû à la plume racée d’Alain Gerber ( Jazz Magazine n°166, Novembre 1966) auquel le musicien avait confié que le Petit Prince de St Exupéry était son livre de chevet. Ce qui n’est pas sans rapport avec sa conception humaniste et libre de l’existence.

Avec Don Cherry Le Petit Prince Du Free, Nicolas Fily adopte la même démarche en s’appuyant sur la chronologie des enregistrements du trompettiste (également flûtiste, pianiste, percussioniste, compositeur ) . Excellente manière de découvrir une discographie abondante, révélatrice de l’évolution musicale d'un musicien au timbre singulier, aux suraigus délicatement posés. 

Ce n’est pas une mince tâche à laquelle l’auteur s’est attelé avec ardeur, disposant d’un très grand nombre d’entretiens, de chroniques d’albums et de compte-rendus de concerts de Jazz Magazine et Jazz Hot dont les références figurent dans la bibliographie précise en fin d’ouvrage. Tous ces auteurs ont facilité son travail de défrichage des terres cherriennes.

L’auteur, passionné de musiques plurielles, a mis à profit ses compétences de disquaire et de critique pour commenter les étapes marquantes de celui qui est resté fidèle à la trompette de poche et au cornet, ses avancées sans omettre les phases plus discutables. Si l’auteur raconte le mythique Festival d’Amougies (initialement prévu à Paris ), le Wood stock belge en Wallonie qui lança nombre jazzmen, le producteur ayant une affiche de rêve avec Pink Floyd, Zappa, il évoque aussi dans “Malaise à Châteauvallon” quelle impression détestable laissa le concert d’août 1972 à un critique de Jazz magazine. C’est qu’à cette époque Don Cherry vivait en hippie et se produisait en tribu. Ce qui n’enlève rien à la profonde humanité du personnage qui s’est adapté en permanence aux sons des générations qui ont suivi quand il n’inventait pas un son propre. On sent que Nicolas Fily aime non seulement le musicien dont il s’attache à retracer le parcours mais l’homme généreux et fraternel.

Le livre est d’une grande lisibilité, découpé chronologiquement en cinq parties ( D’où viens-tu Don Cherry? L’éternel second, l’Etat de Grâce, La Musique organique, D’un monde à l’autre) divisées en sections aux titres explicites, sans compter un prologue et un épilogue. Aucune partie de son oeuvre n’est laissée de côté, présentant toute un intérêt, de la construction difficile car lente à l’épanouissement et l’envol.

Les premiers enregistrements qui font date sont de la fin des années 50 en quartet avec son mentor, son “gourou” le saxophoniste Ornette Coleman avec des albums sortis sur le label Contemporary Something Else, Tomorrow is the question qui lancèrent leur carrière à tous les deux. “Le jazz est désormais prêt pour une nouvelle révolution” s’exclamera Paul Bley. Puis, sur l’entremise d’un autre pianiste, John Lewis, pourtant à l’opposé de cette musique avec son populaire Modern Jazz Quartet, le duo signe chez le renommé Atlantic de Nesuhi Ertegün et s’installe à New york en 1959. Ça décolle vraiment avec The Shape of Jazz to come, marqueur essentiel qui débute avec “Lonely Woman”, preuve que le jazz peut être free sans rimer avec bruit. 

Pierre angulaire de la naissance du free jazz, jusque là appelé la New thing, est enregistré en deux prises par un double quartet le 21 décembre 1960 Free jazz : a collective improvisation ( pochette illustrée par Jackson Pollock). Une expérimentation collective en grand ensemble devenue historique. Disciple de sa musique, sparring-partner, Don Cherry restera toujours indissociable d’Ornette Coleman auprès de qui il fera des retours réguliers.

Le trompettiste travaille beaucoup, prend part à un disque de Steve Lacy Evidence et ne cesse de voyager, trouvant un public plus ouvert et accueillant pour les Noirs en Europe. Son premier voyage en Europe, il le fera avec Sonny Rollins, mais il monte aussi un groupe avec Archie Shepp, joue avec Albert Ayler. Inscrit dans une mécanique de second et de tempérance il rend dicible l’indicible. D’éternel second, il passe à solide challenger avant de connaître un état de grâce. Le label Blue Note lui ouvre son catalogue avec trois albums Complete communion (1965) avecElefantasy”où s’exalte l’Argentin Gato Barbieri, Symphony for improvisers, Where is Brooklyn? (1966). Cherry retrouve Ed Blackwell aux percussions avec lequel il enregistre en 1969 à Paris sur Byg/Actuel, MU First Part et Mu Second Part.

Puis il retrouve Coleman à New York, participe au Liberation Orchestra de Charlie Haden avant de quitter les Etats Unis, protestant contre le gouvernement Nixon. Le trompettiste a eu très tôt le sentiment que son pays ségrégationniste l’avait ostracisé, le poussant de ce fait hors des frontières. A l’image de sa musique en perpétuel mouvement, il s’en est allé chercher ailleurs cette “unity of love”. Il refusa-tout son parcours le prouve, d’être assimilé, classé, réduit à un genre ou style ( sauf peut être l’harmolodie colemanienne).

Commence alors un nomadisme de multi instrumentiste : il élargit sa palette, son style musical évoluant vers les musiques du monde. Il s’installe avec sa femme lapone Moki en Suède en pleine nature pour se ressourcer. Sa musique devient organique usant des instruments rapportés de tous ses voyages ( Maroc, Tunisie, Japon, Inde). Il s’ouvre au champ des possibles avec sa tribu familiale, cette communauté avec laquelle il ne joue plus simplement du jazz, faisant de constants aller-retours entre les styles . En 1975, le jazz s’électrifiant, il change encore d’approche avec Brown Rice. Il faudrait encore citer l’aventure au long cours Old and New Dreams de 1976 à 1987 avec des colemaniens de la première heure, Dewey Redman, Ed Blackman et Charlie Haden. Et aussi ses collaborations avec le percussionniste Nana Vasconcelos et le sitariste Colin Walcott (3 albums chez E.C.M). Jusqu’à la fin, il multipliera les expériences, citons encore Multi Kuti, passage de flambeau avec des musiciens, parfois anciens élèves Le spoken word devient slam, la culture hip hop renvoie à sa propre jeunesse, le “conscious hip hop” étant analogue au free jazz dans sa volonté contestatrice.

Passionné par son sujet, Nicolas Fily fait partager son intérêt et les émotions d’écoute que lui inspire ce musicien fécond, irremplaçable, à l’extraordinaire ouverture d’esprit. Don Cherry Le Petit Prince du Free sera une belle découverte pour les non initiés et convaincra les connaisseurs les plus avertis. Car si on a pu lire sur certaines périodes de son oeuvre, aucun livre à ce jour n’avait été consacré à toute la musique de Don Cherry. Nicolas Fily a donc réussi son coup avec cette somme qui fera référence.

 

Sophie Chambon

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7 mai 2023 7 07 /05 /mai /2023 10:30

  « J’ai toujours aimé la diversité, l’ouverture », nous confiait en 2012 Philippe Sollers.

   L’écrivain, disparu le 5 mai à Paris à l’âge de 86 ans, restera comme l’un des auteurs majeurs de la littérature française qui aura exercé ses talents multiples dans tous les genres.

 

« Philippe Sollers était un amoureux des beaux-arts, de la musique et des lettres, célébrant le sacré d’ici-bas », a salué sa maison d’édition, Gallimard.

 

   Issu d’une famille d’industriels bordelais, diplômé de l’Essec, Philippe Sollers (nom de plume de Philippe Joyaux), voit son premier roman « Une curieuse solitude » publié à 22 ans en 1961 encensé par deux sommités du monde des lettres, Louis Aragon et François Mauriac

   Mais l’œuvre de cet esprit brillant et bretteur riche de plus de 80 titres, comprend aussi des essais, monographies, biographies portant sur la philosophie (Nietzsche), la peinture (Fragonard, Cézanne, Picasso, Bacon, De Kooning), la littérature (Sade, Rimbaud, Proust) et ce qui n’était pas le moindre, la musique. S’il adorait Mozart, Stravinsky, Webern, Philippe Sollers se montrait aussi admiratif de Miles Davis (« un anarchiste chinois. Il me fait penser à Apollinaire un soir de demi-brume à Londres » in 'La guerre du goût'.1994) et de Thelonious Monk. A propos du compositeur de Misterioso, Crepuscule with Nellie, l’écrivain confiait (propos repris dans 'Mystere Monk' de Franck Medioni. Ed.Seghers.2022) : « Monk c’est la folie maîtrisée, la destruction de l’instrument par l’intérieur, la vraie fausse note vraie ».

 

Jean-Louis Lemarchand.

 

©photo Jean Jacques Saubi.

 

 

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6 mai 2023 6 06 /05 /mai /2023 23:03

Le label de l’ingénieur du son-musicien Jean-Marc Foussat a publié récemment deux nouveaux disques, où il dialogue avec Urs Leimgruber et Carlos Zingaro d’une part, et avec Sylvain Guérineau d’autre part ; et deux rééditions venues l’une du label In Situ, qui rassemble Daunik Lazro, Carlos Zingaro, Sakis Papadimitriou & Jean Bolcato, et l’autre du label Potlatch, qui associe Daunik Lazro, Carlos Zingaro, Joëlle Léandre & Paul Lovens

 

JEAN-MARC FOUSSAT & SYLVAIN GUÉRINEAU «Rustiques»

Jean-Marc Foussat (synthétiseur, piano, voix, jouets), Sylvain Guérineau (saxophone ténor, clarinette basse)

24 novembre 2022, Montbarrois (Loiret)

Fou Records FR-CD 49 / Les Allumés du Jazz

https://www.fourecords.com/FR-CD49

 

Ici le dialogue se noue sous l’égide de Jacques Prévert, entre liberté corrosive et tendresse du son et des sens. Libre donc, comme l’air….

Un avant-ouïr sur Youtube

https://www.youtube.com/watch?v=sB9NTl3HVw8

 

JEAN-MARC FOUSSAT, URS LEIMGRUBER & CARLOS ZINGARO «L’Aile d’Icare»

Jean-Marc Foussat (synthétiseur, voix), Urs Leimgruber (saxophones ténor & soprano), Carlos Zingaro (violon)

Bignac (Charente), 22 mars 2019

Fou Records FR-CD 44 / Les Allumés du Jazz

https://www.fourecords.com/FR-CD44.htm

 

Qu’est-ce qui, de l’envol ou de la chute, détermine le cours des choses, et de la musique donc. «Le mystère des choses, où est-il ?» nous dit le poème de Fernando Pessoa, sur le livret du CD. Ne le cherchons pas, laissons venir à nous ces sonorités vibrantes de sensations et d’images. Elles nous conduisent au terme du poème : «Les choses n’ont pas de signification : elles ont de l’existence. Les choses sont l’unique sens occulte des choses»

 

 

LAZRO-ZINGARO-PAPADIMITRIOU-BOLCATO «PeriΦeria»

Daunik Lazro (saxophones alto & baryton), Carlos Zingaro (violons électrique & électro-acoustique), Sakis Papadimitriou (piano), Jean Bolcato (contrebasse & voix)

Vandœuvre-lès-Nancy, 10-12 avril 1993

Fou Records FR CD 43 / Les Allumés du Jazz

https://www.fourecords.com/FR-CD43.htm

 

Dans le texte du livret le pianiste Sakis Papadimitriou évoque l’origine du titre en grec ancien, et tout ce qu’il transporte de sens induit, de rêves et de dérives. Entre le périmètre du cercle, le fait de porter la vie ou le sens, l’odyssée d’Ulysse ou le tournoiement du derviche, c’est un espace ouvert, et donc libre, qui s’est offert aux musiciens. Tous ensemble , ou par dialogues transversaux, ils nous entraînent dans cette liberté, la leur, qui devient nôtre autant que nous choisissions de les suivre. Le plaisir et la surprise sont au bout du chemin. Suivons-les avec bonheur.

 

 

MADLY YOU

Daunik Lazro (saxophones alto & baryton), Carlos Alves ‘Zingaro’ (violon), Joëlle Léandre (contrebasse, voix), Paul Lovens (contrebasse, scie musicale)

Le Blanc-Mesnil, 22 mars 2001

Fou Records FR CD 46 / Les Allumés du Jazz

https://www.fourecords.com/FR-CD46.htm

 

 

Pour évoquer cette musique, simplement citer cet extrait du livret, signé P.L. Renou : «Deux secondes à peine ont suffi à Joëlle Léandre, Daunik Lazro, Carlos Zingaro et Paul Lovens pour parapher d’une main collective ce silence d’avant la musique, dont la déchirure, si elle ne procède pas de lui, la soumet aux emprunts arbitraires qu’on a dits, qui l’inféodent aux langages communs, l’adressant ainsi à une oreille commune». Tout est dit, qui nous prépare à écouter ce nouveau miracle de l’improvisation collective, dont le quartette a cultivé dès longtemps le secret

Xavier Prévost

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