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15 décembre 2017 5 15 /12 /décembre /2017 16:57
FRANK KOFSKY John Coltrane Conversation
 
 
John Coltrane Conversation Frank KOFSKY
 
Voilà un petit livre dont la lecture est conseillée absolument quand on aime le jazz vif, les années soixante et ...John Coltrane. Un livre de "pochette", de 47 pages que publient les éditions Lenka Lente de Guillaume Belhomme.
Il s'agit de l'une des dernières interviews de Coltrane réalisée par un fou de jazz, historien, chroniqueur, Frank Kofsky, qui allait devenir l'auteur d'ouvrages manifestes sur le jazz, la musique créative de l'époque. Eperdu d'admiration pour John Coltrane depuis sa découverte dans le Round about Midnight du groupe de Miles Davis en 1957, il s'attacha à le suivre, à garder un lien en essayant d'organiser des concerts au sein de l'université.
Pendant l'été 1966, il interviewe des musiciens de jazz à New York et Coltrane figure en tête de sa liste. C'est ainsi que le 18 août 1966, faisant preuve d'une touchante disponibilité, le saxophoniste favorisa la rencontre, à l'arrière de sa voiture, sur le parking d'un supermarché, avant de raccompagner Kofsky à la gare et d'attendre avec lui son train pour Manhattan.
Une conversation passionnante qui alla bien au-delà de la seule musique de jazz et de la New thing. Kofsky insiste sur l'humilité et la sincérité de l'engagement de John Coltrane qui reliait la musique à une autre dimension, essentielle. "La musique est un instrument qui peut amener les gens à penser différemment."
Cet échange restitue le contexte social et politique d'une Amérique raciste qui s'enlise au Vietnam. Et pourtant le monde change, quelle créativité dans cette avant-garde musicale à laquelle Coltrane participe, presque malgré lui, tant il est alors absorbé, encore et toujours, par sa musique, expression de tous les enjeux. Kofsky, un pur "socialiste" au sens américain du terme, a une idée très précise de l'histoire en marche et ses questions orientées ( la réception et l'exploitation d'une musique noire par les Blancs, les différences d'approche en Europe...) ramènent toujours le musicien vers ce jazz en ébullition qui fait presque table rase de tout : pas étonnant que Kofsky ait ensuite écrit John Coltrane and The Jazz Revolution of the 1960s.
Cette conversation, précieuse, permet à Coltrane d'évoquer ses recherches et expérimentations après Ascension, de préciser en quoi le passage au soprano, dont il avoue préférer la sonorité, a modifié jusqu'à sa façon de jouer du ténor. Il cherche à évoluer, même au prix de bouleversements, il s'est séparé d'Elvin Jones et de Mc Coy Tyner, il choisit de faire appel à plus de percussions et moins de piano, d'aller vers des systèmes musicaux extra-européens, de jouer avec d'autres groupes, dans d'autres contextes que les clubs, devenus inadaptés à une musique qui doit prendre le temps de se développer.
L'énergie doit circuler et le musicien écouter jusqu'à l'intérieur de lui même, pratiquer sans cesse, chercher, quitte à s'arrêter s'il ne trouve plus ce qu'il faut jouer. Eternel insatisfait, Coltrane mourra moins d'un an après, en juillet 67, mais il aura transformé le jazz.

Sophie Chambon          
FRANK KOFSKY John Coltrane Conversation
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23 septembre 2017 6 23 /09 /septembre /2017 05:57

A quelques jours du centième anniversaire de la naissance de Thelonious Monk, le 10 octobre 1917, la collection Folio (éditions Gallimard) ressort, avec une nouvelle couverture, une photo du pianiste par Herb Snitzer, un classique des biographies du grand-prêtre du Bop, Monk, du à la plume de Laurent de Wilde.

 


Sorti en 1996, l’ouvrage s’est vendu à ce jour à plus de 100.000 exemplaires, avec des versions en anglais, japonais, espagnol, italien.
« La musique de Monk est inclassable, inassimilable. Non parce qu’elle est révolutionnaire, ce qui n’est pas une raison en soi mais parce qu’elle est un pavé dans la mare qui, une fois jeté, coule à pic et disparaît. On le regarde sombrer et on ne sait s’il faut suivre des yeux cette masse qui s’enfonce, ou contempler l’onde égale de ses remous » (Monk. Laurent de Wilde. P144).
Passionné de Monk, Laurent de Wilde, pianiste lauréat du Prix Django Reinhardt de l’Académie du Jazz en 1993  lui consacre un album, enregistré en trio (Jérôme Regard, basse, Donald Kontomanou, batterie), New Monk Trio (Gazebo-L’autre distribution), qui sera disponible dans les bacs le 20 octobre.
Jean-Louis Lemarchand

 


Concerts de Laurent de Wilde. Le 30 septembre à Dole, le 7 octobre à Vincennes (théâtre Sorano), le 26 octobre au Bal Blomet (75015) et du 4 au 6 décembre au Duc des Lombards (75001).

 

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15 septembre 2017 5 15 /09 /septembre /2017 20:28

 

Vous avez adoré « Les Fous du Son » (Grasset.2016) sous la plume de Laurent de Wilde (lauréat de l’Académie du Jazz), vous serez bluffé par « La Fabrique du Son » (Editions Textuel), histoire visuelle de l’enregistrement sonore signée Terry Burrows. Une somme (352 pages et 800 documents visuels) qui retrace les inventions de 1857 –le phonautographe, du à Edouard-Léon Scott de Martainville- à nos jours-les plateformes de streaming). « Un siècle d’inventions frénétiques poursuivant toutes le même but, écrit en préface Laurent de Wilde : attraper ce fragile papillon qui volète autour de nos oreilles, le mettre dans une boîte et le faire miraculeusement renaître à la demande. Célébrant ainsi, éternellement, la grande magie du son ». Un voyage illustré richement qui nous fait parcourir les quatre étapes de l’évolution du son enregistré, acoustique, électrique, magnétique, numérique. Une histoire dont les héros se nomment Charles Cros, Thomas Alva Edison (autodidacte et auteur de 1093 brevets), Les Paul, Phil Spector ou encore Karlheinz Brandenburg (le pionnier du MP3)  
La Fabrique du Son. Terry Burrows. 352 pages. 49 €. ISBN 978-é-84597-584-2 editionstextuel.com

 

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3 septembre 2017 7 03 /09 /septembre /2017 20:17

L’univers de John Coltrane
Roland Guillon. 81 pages. 11,50 €.Edition l’Harmattan.


Auteur prolixe, Roland Guillon a consacré une dizaine d’ouvrages au jazz ces deux dernières décennies. Son champ d’action et de passion se porte sur les années 50-60, avec une attention particulière portée au hard-bop et au free jazz. Cette fois-ci, toujours fidèle aux Editions L’Harmattan et spécialement à la collection Univers musical, le docteur en sociologie s’attaque à un monument, John Coltrane. Fan dès 1959 du « jeune homme en colère » qu’il entendit en concert en 62 et 65, Roland Guillon ne veut pas concurrencer les œuvres majeures et exhaustives sur le ténor (et notamment celles de Lewis Porter et Ben Ratliff). Analysant la période jugée « la plus créative » du saxophoniste, 1959-67, il évoque quelques traits caractéristiques à ses yeux de l’univers de JC dont la modalité, l’africanisme, la croyance (divine), la citoyenneté.  Les qualités de Coltrane tiennent autant, estime-t-il, à son inventivité instrumentale et à son expressivité « extraordinaire » qu’à son ouverture à d’autres mondes. Livre de lecture aisée et rapide (81 pages), « L’univers de John Coltrane » est hautement  conseillé à tous les admirateurs de l’artiste mais aussi à tous ceux qui veulent approcher la personnalité rare d’un jazzman de légende (terme non galvaudé, est-il nécessaire de le dire ?) disparu voici exactement un demi-siècle.
Jean-Louis Lemarchand

 

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13 août 2017 7 13 /08 /août /2017 09:36

Les poilus de Harlem, l’épopée des hellfighters dans la grande guerre.

Thomas Saintourens.

Ed Tallandier.

Ce 1er janvier 1918, les brestois entendent une drôle de version de la Marseillaise. Ses interprètes ? Un big band américain, dirigé par Jim Europe, qui vient juste de débarquer au sein d’un régiment uniquement composé d’engagés noirs, le 15ème d’infanterie de la garde nationale de New York. La formation apportera un soutien moral aux troupes participant aux combats, donnant des concerts dans une vingtaine de villes de garnison et aura son heure de gloire à Paris en se produisant au théâtre des Champs-Elysées et au jardin des Tuileries. Son chef, James Reese Europe troquera même sa baguette pour le fusil sur le front des combats et y sera  victime des gaz allemands. Considéré comme un héros, il aura atteint l’objectif artistique et politique qui avait été fixé par son « patron », l’avocat (blanc) William Hayward :  «  donner au jazz ses lettres de noblesse sur le vieux continent ». Quand il a été enrôlé en 1916, Jim Europe a posé ses conditions à son « employeur » qui souhaitait, par cet engagement de jazzmen, aux côtés d’ouvriers et d’employés mais aussi d’avocats et de sportifs, populariser son régiment. Musicien connu et respecté à New-York ( un enregistrement avait été réalisé en 1914 dont un titre, Castle House Rag  ouvre l’histoire des Big Bands, coffret du à André Francis et Jean Schwarz. Le chant du monde, 2006) il avait obtenu que sa formation comprenne au minimum 44 musiciens et qu’ils soient bien rémunérés, allant même jusqu’à Porto-Rico pour dénicher des interprètes de haute volée. Rentré sur le sol natal , le big band parade devant 250.000 personnes dans Manhattan le  17 février 1919 au milieu des rescapés de la Grande guerre de ce 369 ème RIUS. Le début d’une reconnaissance. La formation, baptisée «   Lieut.James Reese Europe and  His Famous 369th Infantry Band » plus connue sous le nom de « Hellfighters Band » (ndlr : surnom qui leur avait été attribué par les soldats allemands en hommage à leur vaillance) effectue une tournée de dix semaines et enregistre douze albums (la compilation de Francis-Schwarz propose un titre, Russian Rag, composition de Rachmaninoff, gravé en février 1919). Reste que  la ségrégation sévit toujours aux Etats-Unis. « Les héros redeviennent des « negroes », souligne Thomas Saintourens, auteur de cette passionnante épopée des « Poilus de Harlem ». L’année 1919, précise-t-il, est « l’année-record des lynchages aux Etats-Unis, 83 morts dont 77 noirs et au moins dix vétérans de l’armée.  Jim Europe lui-même ne profitera pas longtemps de sa gloire : il meurt en mai 1919 à Boston, atteint d’un coup de couteau donné par un de ses musiciens qui s’estimait maltraité.
Jean-Louis Lemarchand

 

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22 juillet 2017 6 22 /07 /juillet /2017 08:52
Guillaume Belhomme  LE JAZZ EN 150 FIGURES

 

Guillaume Belhomme

Le jazz en 150 figures

360 pages, Editions du Layeur

39,90€

J’aime beaucoup les anthologies et celle-ci ne fait pas exception à la règle, qui traite du jazz en 150 figures portraiturées, de King Oliver (né en 1885) à Martin Kuchen (né en 1966) ou encore 750 chroniques de disques. Pour chaque période, chaque style, un texte introductif, toujours bien écrit, donne un juste aperçu de la période et de l’insertion du musicien dans l’époque. Rien ne vaut l’angle chronologique pour aborder une musique aussi riche et savante que le jazz, qui ne s’est pas vraiment développée en ligne droite. Mais l’intérêt généalogique et les rapprochements stylistiques ne relèvent pas du seul désir de tracer une cartographie de cette musique, d’en montrer une certaine « continuité » : l’auteur assumant parfaitement sa subjectivité, n’écarte pas les dimensions proprement émotionnelles, esthétiques du jeu ou et de la personnalité de ces artistes.

Si vous désirez vous constituer une discothèque de base, voilà réunis avec cette anthologie de Guillaume Belhomme les principaux enregistrements des musiciens sélectionnés, les historiques et les autres jugés tout aussi passionnants, voire indispensables pour l’auteur, qui anime Le son du grisli, soutient et dirige les éditions Lenka lente. Il continue son travail « historique », commencé aux éditions du Mot et du reste, nous faisant toujours partager ses coups de cœur, autrement dit, ses choix personnels dans chaque discographie. Il n’est pas important, semble-t-il, d’infirmer ou non ses propositions, de « chipoter » sur l’absence de tel ou tel incontournable : laissons-nous prendre par cette vision d’un jazz pluriel, une approche plutôt complète après tout, reflétant aussi des musiques d’aujourd’hui . S’il évoque les grandes figures, Guillaume Belhomme s’intéresse aussi aux moins célèbres, les défricheurs pas toujours reconnus, il dresse une superbe galerie de portraits qu’éclairent les photographies et reproductions de pochettes de vinyls ou CDs : des double pages soit deux portraits pour certains musiciens (Konitz, Portal, Shepp, Braxton, D.S Ware, Peter BrÖtzmann, Misha Mengelberg…). Le choix des photos et photographes est original, on y retrouve très souvent Luciano Rossetti, photographe italien ami du guitariste Garrison Fewell (De l’esprit dans la musique créative , Lenka lente, 2016 ) et du New Yorkais Peter Gannushkin.

Ce sera toujours un plaisir de se plonger, au hasard (ou non) dans la lecture de ces pages, de se laisser porter, de remarquer alors des similitudes, des idées de classement, puisque l’amateur de jazz a une âme de collectionneur, d’obsessionnel…

C’est finalement à une réflexion d’ensemble que ce bel objet nous invite : penser aux formes toujours renouvelées, puisque le jazz s’est nourri de tous les apports générationnels et montre des contours toujours changeants. Evitant de figer le jazz dans une aventure, même singulière, Guillaume Belhomme replace ses figures dans l’évolution de cette musique, en soulignant leur personnalité, les caractéristiques de jeu, l’essence de leur art

Erudit mais jamais pédant, facile à lire, voilà un beau travail de recherche mis en valeur par le « montage » des Editions du Layeur . Vivement recommandé pour animer la partie jazz de votre bibliothèque, faisons-lui une place aux côtés, par exemple, du Dictionnaire du Jazz (Bouquins), des portraits de Pascal Anquetil (Tana éditions) ou encore des livres des éditions Lenka Lente, Parenthèses, Outre Mesure, du Mot et du Reste...

 

Sophie Chambon

 

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29 juin 2017 4 29 /06 /juin /2017 19:34

Mets le feu et tire-toi
James McBride.

Traduit de l’américain par François Happe. Editions Gallmeister. Mai 2017. 336 pages. 22,80 € 
Il a marqué l’histoire de la « great black music » avec bruit et fureur. Plus de deux cent millions de disques vendus en quarante-cinq ans de carrière, des succès planétaires et éternels ( Please, Please, Please, Papa’s Got a Brand New Bag, Say it Loud, I’m Black and I’m Proud), des concerts-shows époustouflants : James Brown a connu la gloire de son vivant. Sa personnalité restait pourtant encore mystérieuse quand il disparut le 25 décembre 2006 à Atlanta (Georgia) à 73 ans. Le travail d’enquête auquel s’est livré James McBride, romancier américain (Color of Water,1995) et saxophoniste ( joua dans le groupe du chanteur Jimmy Scott) permet de dresser un portrait aussi précis qu’intime du Godfather of Soul, sans céder à la tentation des ragots, argument commercial habituel des biographies. McBride a rencontré de nombreux proches de James Brown, des musiciens (Pee Wee Ellis notamment), des gérants de ses affaires, des amis et nous offre des témoignages sensibles et percutants.
 Le petit homme (168 centimètres) du Sud, natif de Barnwell (Caroline du Sud) était un homme dur, voire brutal (en affaires et dans la vie privée), un artiste perfectionniste au dernier degré, n’hésitant pas à faire répéter deux à trois heures durant son orchestre, chœurs y compris, ….. et ce après un concert pour rectifier les moindres défauts. Il n’avait comme seul objectif que de « casser la baraque » sans aucun compromis et avait comme principe « Mets le feu et tire-toi ». On le vit ainsi reprendre son avion dès la fin du concert donné à Kinshasa à l’occasion du combat de boxe Ali-Foreman (1974) sans attendre les diamants promis à tous ses invités par le président Mobutu. L’homme qui s’était engagé publiquement en faveur de la cause de ses frères noirs ne se découvrait pas pour autant. « Il n’avait pas envie que les gens le connaissent (…) Il faisait tant d’efforts pour cacher ses sentiments », relève James McBride. Star  mondiale, James Brown est ici décrit comme un solitaire qui confie à un proche : «  Vous êtes le seul homme à savoir que je ne sais pas aimer ». Et pourtant, un de ses derniers gestes aura été de léguer une grande partie de sa fortune à une fondation qui devait financer les études d’enfants défavorisés de son Sud natal. Une disposition qui sera hélas annulée par une procédure judiciaire lourde engagée par les nombreux héritiers du Parrain de la Soul.
Un document sérieux et passionnant qui en dit beaucoup sur un artiste mythique et-ce qui n’est pas moins intéressant-sur l’état d’esprit  des Etats du Sud des Etats-Unis.
 Jean-Louis Lemarchand

 

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30 avril 2017 7 30 /04 /avril /2017 08:24
Jacques PONZIO Thelonius MONK Abécédaire AB C- Book

Jacques PONZIO

 

Thelonius MONK

Abécédaire AB C- Book

Editions Lenka Lente

www.lenkalente.com

 

 

Voilà un petit livre passionnant qui vous en apprendra beaucoup sur l’une des personnalités du jazz les plus extraordinaires, le pianiste Thelonius Sphere Monk, l’un des créateurs du be bop, qui demeure une énigme tant sa musique est  inclassable.http://www.lenkalente.com/product/abecedaire-thelonious-monk-de-jacques-ponzio

Les éditions Lenka Lente, dont on suit le travail avec attention depuis longtemps, ont fait appel à l’un des critiques spécialistes du pianiste qui avait déjà écrit avec François Postif un Blue Monk très remarqué il y a plus de vingt ans, sorti chez ACTES SUD.

Il reprend l’un de ses thèmes de prédilection, sous une autre forme, plus digeste mais aussi plus ludique, un abécédaire de 140 pages et citations qui permet d’apprendre beaucoup de choses en picorant, en suivant les lettres. Comme il s’agit d’une édition bilingue, l’ordre suit l’anglais : la première entrée est « Activisme » où l’on apprend que Monk a regardé la marche des droits civiques de 1963 à la télé, n’ayant pas jugé bon d’y participer, ajoutant que sa musique avait par ailleurs contribué à l’avancement de la cause. La dernière entrée, par contre est Wrong Notes ( Fausses Notes) : « Il n’y a pas de fausses notes, certaines sont seulement plus justes que d’autres ».

Où l’on voit que Monk avait un sens réel de l’humour, et que, s’il avait une prédilection pour le silence, y compris en musique, « il n’en a pas moins exprimé des vues très fortes sur la vie, la musique, les autres ». Il s’exprime autant sur le be bop, que sur les papillons, certains termes techniques…Avec bon sens, précision et finesse.

Un petit livre instructif que l’on découvrira avec plaisir, car si l’on suit Monk à la lettre, il n’en demeure pas moins quelque chose de son esprit.

 

NB : Ajoutons une délicieuse préface de François Billard, des notes très pertinentes, un index français anglais et des sources bibliographiques bienvenues pour compléter sa recherche. Quelques photos dont celle de la chevalière avec les lettres MO en onyx, séparées des 2 NK par de gros diamants. Tout un jeu de lettres puisque MONK retourné se lit aussi KNOW.

 

 

Sophie Chambon

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19 avril 2017 3 19 /04 /avril /2017 08:03

Une civilisation du rythme, Jacques Réda.
185 pages. 23 €. Buchet-Chastel. Le livre comprend un CD reprenant en 25 titres des œuvres des quatre grandes formations passées en revue, Fletcher Henderson, Duke Ellington, Jimmie Lunceford, Count Basie, sur la période 1924-1940.

 

« It don’t mean a thing if ain’t got that swing ». Bien connue de tous les amateurs de jazz, la sentence de Duke Ellington énoncée dans la composition de 1932, figure en exergue du dernier ouvrage de Jacques Réda, « Une civilisation du rythme ».
L’auteur avait alors trois ans. Autant dire que le poète, rédacteur en chef de la Nouvelle Revue Française( 8 ans durant), collaborateur historique de Jazz Magazine, auteur notamment de « L’improviste », « Autobiographie du jazz » a baigné dès ses plus tendres années, dans ce jazz qui swingue et porte une dévotion totale au rythme.
Pour son 67ème ouvrage, Jacques Réda se livre, avec générosité et finesse, à une analyse de cet élément fondamental, le rythme, en limitant son champ à ces « grandes manufactures du swing », autrement dit les big bands, et plus précisément quatre d’entre elles –Fletcher Henderson, Duke Ellington, Jimmie Lunceford, Count Basie- dans leurs œuvres produites sur deux décennies (1924-1945).
« Le rythme, écrit en introduction Réda, est la manière dont on organise ou s’ordonne le mouvement. «  Plus loin, il approfondit : « Le rythme, plus que tout élément de l’art musical, semble en contact direct avec ce que l’on pourrait regarder comme le principe commun à toutes les grandes « forces » naturelles dont l’action se situe dans le Temps. ».
Au fil des pages, le lecteur peut, sur cette trame, partir à la découverte de ces « dansants dinosaures » que furent les quatre grandes formations ci-dessus mentionnées, en s’aidant de l’écoute de 25 titres-clés, témoignages de ces deux décennies, de Copenhaguen (1924) par Fletcher Henderson à  Koko de Duke Ellington (1940). Le voyage est instructif, attrayant, bluffant, sous la conduite d’un guide passionné, érudit  et modeste tout à la fois. « Je ne crois pas nécessaire de commenter des faits éloquents en eux-mêmes », note-t-il ainsi à propos des duos de 1939 entre Edward Ellington et Jimmy Blanton.
Une question taraude le journaliste-chroniqueur. Le swing appartiendrait-il à ce passé glorieux d’avant-guerre (la seconde et peut-être la deuxième) ? Jacques Réda s’interroge : « Y-aura-t-il une sorte de renaissance du swing sous une forme encore imprévisible mais sans rupture fondamentale avec celui qu’Ellington et Basie nous ont légué (…)? Quelles seraient aujourd’hui les sources « populaires »d’une nouvelle approche du rythme ? ».Question essentielle et ouverte à laquelle l’observateur clairvoyant (et prudent) se garde bien d’apporter une réponse.
Jean-Louis Lemarchand
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3 mars 2017 5 03 /03 /mars /2017 05:55

La beauté de Bud Powell

Jean-Baptiste Fichet

Editions Bartillat

 

C'est un paradoxe. Même s'il fut l'une des têtes d'affiche d'un prestigieux club pari sien (le Blue Note, quartier des Champs-Elysées) des années durant, Bud Powell (1924-66)n'aura guère inspiré les auteurs français. Signé Francis Paudras, La danse des infidèles (1986), reste comme l'ouvrage de référence et de révérence, reflétant toute l'admiration que portait son auteur au pianiste qu'il protégea tout au long de son séjour parisien

On retrouve sous la plume de Jean-Baptiste Fichet, dans La beauté de Bud Powell, ce même sentiment admiratif : « la lumière émise par Bud Powell, la beauté qu'il a cherchée continuent de balayer l'univers-au présent. Le pianiste a laissé derrière lui cette floraison de bourgeons, milliers de buds portant pollen, graines disséminées aux vents du jazz ».

Jugeant au départ le jazz plutôt « hermétique », Jean-Baptiste Fichet (34 ans, de formation commerciale) a finalement ressenti un choc, un « coup de foudre » à l'écoute d'Off Minor, thème de Monk dans sa version de Bud. Il écrit (page 31) : « Off Minor : dix fois, cent fois, mille fois. Moulin à prières. Sourate. Mantra ». On l'aura compris. Plutôt qu'une biographie- les fans de Bud pourront se reporter au volumineux ouvrage de Peter Pullman, Wail-The Life of Bud Powell, 2012, disponible sur le site de l'auteur new yorkais), c'est un portrait très personnel que nous propose Jean-Baptiste Fichet. Le livre a toute la fraîcheur d'un premier ouvrage avec ses envolées lyriques et ses multiples évocations littéraires. N'y cherchez pas-et c'est tout à l'honneur de l'auteur, d'anecdotes croustillantes ou sordides qui sont le lot commun des biographies destinées au grand public. L'homme décrit en 200 pages «  a une aptitude extraordinaire pour la musique, une inaptitude féroce pour tout le reste ». En lui, analyse Jean-Baptiste Fichet « cohabitent toute beauté et toute douleur ». Un bien beau livre tout en sensibilité, un hommage littéraire au jazzman tourmenté qualifié de « génie » par Duke Ellington et Charlie Parker.

 

Jean-Louis Lemarchand

Jean-Baptiste Fichet présente son livre ce vendredi 3 mars à 19 h à la librairie Les Traversées (2, rue Edouard Quenu. 75005).

 

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